Tour à tour plasticien, actrice, modèle, danseur, performeur, diva éventuellement, Jean-Luc Verna déploie son oeuvre depuis près de 20 ans, avec le dessin comme colonne vertébrale. Au micro de Manou Farine, Jean-Luc Verna retrace les contours de ce parcours artistique polymorphe.
Je viens de la rue, et maintenant, je suis dans les musées. Le dénominateur commun, c'est mon corps.
Jean-Luc Verna
Sous le signe des étoiles
La masterclasse de Jean-Luc Verna est placée sous le signe de l'étoile, qui se retrouve partout dans son oeuvre depuis ses débuts, il y a vingt-ans. Tout au long de cette heure, Jean-Luc Verna tisse les contours de son oeuvre, qui tend à lier la culture populaire, à l'érudition. De sa définition du dessin, à la pratique de la danse, jusqu'à l'utilisation du calque comme procédé vernaculaire, Jean-Luc Verna nous livre son processus de création, en convoquant ici et là, les figures de Marguerite Duras, Barbara ou encore Siouxsie Sioux. Plus de 20 ans de carrière, et autant de pratiques artistiques, qui se nourrissent entre elles, pour former un écho général dans son oeuvre polymorphe.
L’étoile est un symbole transversal, trans-historique, un signe que l’on retrouve dans l’architecture, les arts de la table, les jouets, des choses vernaculaires et érudites à la fois. Une étoile a cinq branches, c’est une figuration du corps humain. C’est une pensée magique contre une pensée religieuse, le combat de l’étoile contre la croix catholique.
Jean-Luc Verna
La pratique du dessin comme une bulle de résistance
Avant que le dessin ne s'impose, Jean-Luc Verna a fait un détour par la peinture, lors de sa formation à la Villa Arson à Nice, au début des années 1990. C'est en 1992 que la Galerie Air de Paris l'a pris sous son aile, une période où il n'y avait aucun marché du dessin. Les années qui suivirent, son dessin a connu plusieurs étapes, une série d'opérations : un premier dessin, puis calqué, puis photocopié, puis transféré sur différents supports avant de le reprendre, et de le rehausser.
La pratique du dessin a été mon premier refuge pour créer une bulle de résistance contre le bain acide et d’humiliation dans lequel je suis venu au monde. (...) Mais danser a été mon premier rêve d'art, j'ai fait du dessin par défaut. Durant mes premières années de pratique, j'étais un stakhanoviste, je dessinais 5 à 6 heures par jour, je montais mes gammes. Je me nourrissais auprès de mes maîtres, d'Ingres à Michel-Ange. Mais je ne me nourri plus qu'à la moitié de ce que je déteste. Il faut se rendre perméable au savoir, et pouvoir s'en détacher, sinon on est faiseur. Il faut savoir oublier ce qu'on a appris. (...) J'aime que le dessin soit quelque chose de magique, il faut savoir le transformer comme je le fais avec mon corps. On a cru pendant les premières années de ma carrière, que mes dessins étaient uniquement des emprunts car j'utilisais du calque. (...) Or le procédé du calque est une béquille pour boiter magnifiquement et pour avoir une belle démarche.
Jean-Luc Verna
"Mon genre, c'est celui du plastique"
Jean-Luc Verna a été punk et prostitué dans une première vie, avant de devenir performeur, danseur pour Gisèle Vienne notamment, membre des groupe Le Grand Tunnel Mou (années 1980), I Apologize and Beauty and The Beat (dans les années 2000) , icône du cinéaste Brice Dellsperger depuis 1999. Depuis le début de sa carrière, Jean-Luc Verna déploie différentes écritures chorégraphiques, au travers le dessin, la chorégraphie et la photographie comme une célèbre série de nues dans les années 2000, faisant écho à l'histoire du rock and roll. Il ajoutera prochainement une derrière corde à son arc : celle du théâtre. Une grande rétrospective de son oeuvre a eu lieu en 2016 au MAC/VAL à Vitry sur Seine.
Je ne fais pas de l’art pour m’adresser aux gens qui sont supposés avoir la même sexualité que moi ou ne pas avoir de cheveux et aimer le tatouage. L’écho doit se faire avec des gens qui n’ont si possible rien de commun avec moi, et c’est comme ça que je trouve ma place dans la société. (...) J'ai toujours été dans l'ambivalence. Mon genre, c'est celui du plastique. Je ne tiens pas à faire semblant d'être un homme ou une femme, je suis un artiste. Peu m'importe la sexualité. L'idée de la sexualité me plaît plus que la sexualité elle-même. Elle n'est plus une question pour moi. (...) J'aime l'intime, la déflagration de soi à soi.
Jean-Luc Verna
Pour aller plus loin
Jean-Luc Verna est représenté par la Galerie Air de Paris.
Numéro CQFD consacré à Jean-Luc Verna, par le MAC VAL, lors de la grande rétrospective de son oeuvre en 2016, à lire en ligne.
Une analyse du cinéma de Brice Dellsperger, par Mickaël Pierson, dans la revue Chimères en 2011, à lire sur Cairn.
Conférence de Jean-Luc Verna à l’Ecole supérieure d’art Pays Basque – Rocailles, 20 mars 2014, à voir sur Youtube.
Jean-Luc Verna ou « le moi » en permanente métamorphose : une présentation du spectacle de Jean-Luc Verna et du groupe I Apologize au Centre Pompidou en janvier 2013.
Cette Masterclasse a été enregistrée en public, à la Foire Internationale d'Art Contemporain de Paris, en octobre 2019.
July 04, 2020 at 07:00PM
https://ift.tt/38yeFeH
Jean-Luc Verna : "J'ai une grande fascination pour le mensonge, c'est pourquoi je suis dans la représentation" - France Culture
https://ift.tt/3i8EQx8
dessin
Bagikan Berita Ini
0 Response to "Jean-Luc Verna : "J'ai une grande fascination pour le mensonge, c'est pourquoi je suis dans la représentation" - France Culture"
Post a Comment